vers 1755
Huile sur toile.
98 x 85 cm.
Cette œuvre est reproduite dans le catalogue raisonné de l’œuvre peint
de Fragonard par P. Rosenberg.
Certificat de René Millet Expertise.
Trois jeunes gens batifolent dans un parc au pied d’un vase sculpté. La jeune fille, assise au centre, est ballottée entre ses deux prétendants. À droite, l’enserrant par la taille, le premier soupirant l’attire à lui pour lui susurrer quelque mot doux à l’oreille, cependant qu’elle se retourne vers le second, à gauche, afin de le gratifier d’une couronne de fleurs. Ce dernier, l’air langoureux, tient dans ses bras une cible dont le cœur est percé de deux flèches. A leurs pieds gît un carquois rempli de flèches. Cette scène galante, au-delà des gestes explicites, est connotée de symboles érotiques comme les flèches décochées par l’Amour dans le cœur de la jeune femme ou le vase central, axe de symétrie phallique, dominant la scène. Jusqu’aux couleurs suaves des vêtements masculins – rose orangé, corail- qui sertissent la pureté du blanc de la robe.
Jean-Honoré Fragonard (1732-1806) est un peintre majeur du XVIIIème siècle. Formé dans l’atelier de François Boucher, Fragonard s’initie au style rococo du maitre. Prix de Rome à 20 ans, il part en Italie en compagnie d’Hubert Robert et y découvre la peinture virtuose de Tiepolo. En 1765, il est reçu à l’Académie comme peintre d’histoire mais quitte ce grand genre pour se consacrer à une peinture plus galante voire érotique, plus en phase avec les goûts de la cour de Louis XV. La légèreté de sa touche, qui sait saisir l’instant fugace d’un regard ou d’un baiser, est toujours empreinte d’élégance et de retenue comme en témoigne la Coquette fixée.A la frivolité du sujet, s’ajoute une candeur, soulignée par des couleurs pastel. Les personnages, jamais grivois, incarnent plutôt l’innocence d’une enfance toujours latente. La Petite jardinièreappartient encore à cet âge tendre, spectatrice avant d’être bientôt actrice. Les paysages bucoliques aux verts tendres, parsemés de fleurettes, servent souvent d’écrin à ces idylles éphémères. Cette peinture de l’intime, destinée aux appartements privés, est très en vogue au milieu du XVIIIe s., fort appréciée du roi et d’une aristocratie libertine. Ces petits formats aux tonalités suaves siéent à merveille aux alcôves pour lesquelles elles sont destinées.